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C’est en 1966 au Musée des Arts Décoratifs de Paris que le sculpteur François Stahly va se faire connaître auprès du grand public grâce à la rétrospective consacrée à son œuvre. L’ensemble L’été de la Forêt est particulièrement remarqué. Stahly confie dans une interview: 

« Cette œuvre m’a donné une toute nouvelle impulsion, ce qui, dans la sculpture peut être lié à l’idée du sacré. »

Prenant conscience du rôle décoratif auquel la sculpture est assignée dans un contexte de commande architecturale, Stahly décide de s’en affranchir et de créer une œuvre monumentale autonome.

L’été de la forêt à Kykuit, domaine Rockefeller, Tarrytown

C’est dans le havre de paix du jardin de ses ateliers de Meudon, qu’il élabore lentement à partir de 1960, L’été de la Forêt, ne répondant à aucune commande, ni contraintes de budget ou de calendrier.

Inspirée du souvenir des hautes futaies suisses de son enfance et des vastes forêts découvertes lors de ses séjours prolongés aux USA, Stahly donne à l’oeuvre « cette respiration authentique » qui en fera l’une des pièces majeures de son oeuvre. 

Il émane de ce « bois sacré », assemblage de poutres de chêne, sculptées à la gouge d’empilements de cônes tronqués, faisant cercle autour d’un seuil symbolique constitué de deux poutres monumentales s’épanchant l’une contre l’autre, une sensation de mystère indicible mais néanmoins bienveillant.

L’été de la forêt dans le jardin de l’atelier de Meudon

L’élan vers le ciel de l’œuvre traduit ce profond désir de l’artiste de communiquer avec le monde cosmique, « désir de sortir de soi, désir de communiquer avec tout ce qui vit ».

En écho à la question posée dans un entretien, qu’est ce que la sculpture : une poésie, une mystique ? Sans hésiter Stahly répond : « Oui, une mystique ».

L’été de la Forêt que nous somme heureux de présenter en avant-première sur la Friche de l’Escalette, a été vu du public pour la première et dernière fois en 1966 au Musée des Arts Décoratifs avant sa longue éclipse dans le parc de Kykuit, le fabuleux domaine familial Rockefeller depuis quatre générations, situé dans la vallée de l’Hudson à Tarrytown au nord de New-York.

Nelson Rockefeller, admirateur fervent de l’œuvre de Stahly en avait fait l’acquisition pour sa propriété. Sa vente de succession en janvier 2019 a permis le retour de l’œuvre en France.

Stahly est cité en « italique » dans le texte.
cf. stahly.fr/lete-de-la-foret/ Pierre Mougin 2019.

« (…) Maintenant, la menace de pollution devenant de plus en plus forte, nous commençons à nous sentir solidaire des nuages, des eaux, des feuillages, des terres, alors peut-être pouvons nous voir en François Stahly le premier sculpteur moderne de l’environnement, le premier à concevoir à nouveau la sculpture comme un lieu ou il serait possible d’être ensemble. »

Pierre Descargues. François Stahly, Editions La Connaissance, Bruxelles, 1975.

« (…) il y avait Arp et Brancusi : à l’usage des initiés, mais aussi la découverte des sculptures primitives et, par delà les formes, la soif des sources pures ou s’abreuvent les grands spirituels (…) qui enseignent l’amour de la vie et entretiennent cette disposition émerveillée devant le monde qu’il est donné d’approcher à travers certains aspects de l’art. »

François Mathey. Catalogue de l’exposition François Stahly Musée des Arts Décoratifs Paris, 1966.

« L’Eté de la Forêt » est un groupe monumental sculpté par François Stahly au début des années soixante que seuls les Américains et certains touristes ont pu voir jusqu’à présent, s’ils ont eu la chance de visiter la propriété des Rockefeller dans la Vallée de l’Hudson.

Constitué d’un portique et de plusieurs colonnes ou totems en chêne, il relève d’une série d’œuvres qui combinent et déclinent le thème de l’élévation et de l’organicité. « Le bois, ce matériau vivant et séducteur qui nous incite à suivre les sinuosités de sa croissance » comme l’a écrit le sculpteur, lui permet d’obéir à sa puissance d’imagination, lui qui avouait travailler « comme un arbre ou une plante qui pousse ».

 

Plusieurs œuvres de cette époque américaine sont aussi une allusion directe aux arbres géants des forêts américaines que l’artiste traverse alors.
Elles se nomment « Arbres-échelles », « Forêts », « Totems », « Fleurs ». A partir de 1960, le sculpteur François Stahly est professeur invité ou artiste en résidence dans différentes universités américaines. Il entre alors en contact avec de nombreux mécènes et commanditaires privés ou publics, pour lesquels il réalise dans ces mêmes années des œuvres monumentales comme des fontaines, des totems ou des groupes sculptés à San Francisco, Dallas, Oakland , Seattle, etc.

C’est grâce à l’Américaine Darthea Speyer attachée culturelle à l’ambassade des Etats Unis à Paris, qui ouvrira sa galerie au 6, rue Jacques Callot en 1968, que François Stahly obtient la commande de « L’Eté de la Forêt » pour le parc privé de Nelson Rockefeller à Tarrytown dans la Vallée de l’Hudson. C’est le même Nelson Rockefeller, gouverneur de l’Etat de New-York, qui commandera à l’artiste pour le toit-terrasse du Capitole de l’Etat de New York à Albany, un « Jardin-Labyrinthe » (1969-74) de cent mètres de long…toujours visible actuellement.

Tandis qu’à Paris, une autre « Forêt », la plus spectaculaire de toutes, avait été réalisée quelques années auparavant (1962-63) pour la Maison de la Radio. Récemment restaurée avec grand soin, elle regroupe quatre groupes de trente-cinq sculptures-arbres en acajou, disposées en mur-rideau qui accueille aujourd’hui l’auditeur à son entrée dans le bâtiment, bien visibles depuis le quai de Seine.

Depuis la Suisse de son enfance, en passant par les montagnes du Vaucluse (Le Crestet) et par celles des grands espaces américains, l’artiste a développé une relation essentielle avec la nature, conçue comme le reflet d’une conscience de soi.  Aujourd’hui, plus que jamais, la vision humaniste que porte François Stahly sur son art et son métier nous inspire.

 

Scarlett Reliquet pour le Comité François Stahly

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